Les Anglais disent „count your blessings“, ce qui signifie grosso modo qu’il vaut mieux se focaliser sur ce qui est positif dans votre vie que sur le négatif. Ce qui ne veut pas dire que cela dépend exclusivement de notre attitude: il est évident qu’une part de chance entre en compte, car comme disait sagement Coluche, « mieux vaut être riche et bien portant que pauvre et malade ». En effet, dès le départ nous ne sommes pas tous égaux face au bonheur : on a logiquement plus de chances d’être heureux si l’on naît dans une famille unie, qui a de quoi vivre et qu’on jouit d’une solide constitution que si l’on est affamé, malade et seul au monde. Mais même ces « facteurs chance » classiques ne garantissent en rien le bonheur : tous les jours, des gens riches, en bonne santé et aimés se suicident. En supposant qu’on se situe dans la moyenne des individus, ni insolemment riches ni misérables, et qu’il nous arrivera au cours de notre vie comme à tout le monde une dose moyenne de joies et de peines, comment faire la différence au quotidien et se donner les moyens d’être heureux ?
1) Se focaliser sur ce que l’on peut changer et accepter ce que l’on ne peut pas changer :
Selon le proverbe tibétain : « Si un problème a une solution, alors il ne sert à rien de s’inquiéter ; si un problème n’a pas de solution, alors s’inquiéter ne sert à rien. » Pour atteindre le bonheur, tous les psys et les coachs comportementaux le disent, le lâcher prise est essentiel. Accepter que l’on n’est pas maître de tout est un premier pas. Beaucoup d’éléments échappent en grande partie à notre contrôle, comme la maladie, la mort, le contexte politique et économique ou tout simplement le temps qu’il fait. Nous pouvons bien entendu mettre toutes les chances de notre côté : nous pouvons manger aussi sainement que possible et prendre soin de notre corps, mettre nos économies à l’abri dans le plus sûr des placements. Mais malgré toutes les précautions possibles, nous ne pouvons que minimiser les risques : rien ne peut garantir à 100% que nous ne serons pas quand même malades ou ruinés par une crise économique. Alors plutôt que de s’angoisser sur les évènements que nous ne pouvons guère maîtriser, l’un des premiers secrets du bonheur est d’investir notre énergie uniquement dans ce qui est à notre portée, ce sur quoi nous pouvons agir, plutôt que sur les choses qui nous dépassent. Je ne peux pas décider quel temps il fera dimanche, mais en cas de pluie je peux décider de pratiquer une activité d’intérieur que j’aime bien et qui me fera plaisir : regarder un film, jouer aux cartes… Consacrer de l’énergie à ruminer sur des choses qui sont hors de notre rayon d’action possible, comme le temps qu’il fait ou la situation économique mondiale, entretient en nous un sentiment d’impuissance et d’échec extrêmement nocif pour le taux de « bonheur ».
2) Minimiser le flux d’informations que l’on reçoit
« ignorance is bliss », ou heureux sont les ignorants, selon le proverbe anglais. Sans aller jusqu’à pratiquer la politique de l’autruche, il s’agit surtout de cultiver un certain détachement, d’essayer de prendre du recul face aux informations qui nous parviennent et d’en minimiser la quantité autant que possible. Dans son excellent livre « la semaine de travail de 4 heures », Tim Ferriss raconte comment rentabiliser autant que possible le temps passé à travailler pour pouvoir en réduire la durée. L’un de ses conseils est de ne regarder ses emails qu’une fois dans la journée, dans une fourchette horaire impartie, et de résister à la tentation de les regarder en permanence. Il démontre que l’employé moyen est saturé en permanence par un flux d’informations inutiles qu’il perd un temps fou à lire et à trier, et que c’est autant de temps de perdu. Même en dehors du travail, le flux continu d’infos nous poursuit : JT en boucle sur les chaînes d’informations en continu, réseaux sociaux, etc. Il a été démontré que ne pas regarder les informations pendant plusieurs jours contribuait à faire baisser considérablement la pression sanguine et le stress en général. Effectivement, les médias sélectionnent en général les infos négatives, choquantes, et les développent pendant des heures. Si une petite bombe a explosé quelque part, alors qu’au même moment 2500 personnes tombaient passionnément amoureuses et que naissaient 3000 bébés en bonne santé, devinez quelle information fera la une pendant des heures et sera martelée ad nauseam dans votre cerveau ? De plus, on peut devenir addict au flux continu d’informations. Dès qu’on a quelques minutes de libre au bureau, il n’est pas rare de les passer automatiquement à consulter les informations en ligne, encombrant ainsi un peu plus l’esprit d’informations négatives qui ne contribueront certainement pas au bien-être à la fin de la journée. Alors la prochaine fois, au lieu de vous jeter sur les news, regardez plutôt des vidéos de chatons : des études prouvent que cela régule la pression sanguine et améliore l’humeur. Ou encore mieux au rayon animaux : lisez la coccinella !
3) Se mettre en contact avec les autres
L’homme est un animal social et a besoin des autres par nature. Les personnes vivant dans la solitude le savent bien : elles sont en moyenne beaucoup plus atteintes de dépression que les autres. Personnes âgées abandonnées, prisonniers à l’isolement, sans domicile fixes ou individus lambda ayant connu un bouleversement de la vie entraînant une perte de vie sociale (licenciement, déménagement soudain)… Dans nos sociétés modernes et terriblement individualistes, nombreux sont ceux qui souffrent de solitude chronique. Or pour être heureux, c’est mathématique, il faut être (bien) entouré. Il est prouvé scientifiquement que les gens mariés (ou en concubinage) vivent plus longtemps et ont moins de problèmes cardiaques que les célibataires. A deux, on prend mieux soin l’un de l’autre, on se laisse moins aller. Même si l’on n’a pas la chance d’avoir un couple stable, et que l’on n’a pas de vie de famille, avoir une vie sociale satisfaisante est essentiel sur le chemin d’accès au bonheur. Echanger, discuter, jouer ensemble, que ce soit par la pratique d’un sport, d’un instrument de musique ou tout simplement de dîners en groupe, il est fondamental de ne pas rester seul. Aller à la rencontre des autres demande un certain effort, surtout si l’on n’en a pas l’habitude ; mais cet effort sera récompensé au centuple par les bienfaits qu’on en retirera.
4) Donner
On a tendance à voir les gens qui s’investissent dans des associations de charité comme des saints totalement dépourvus d’égoisme. Plutôt que de passer leur dimanche soir confortablement assis devant un bon film ou un match de foot avec une bière, ils trient des vêtements pour les nécessiteux, se décarcassent pour égayer les enfants malades ou vont verser des bols de soupe aux restos du cœur : de vrais anges du sacrifice, pense-t-on. Mais ce qu’on ne sait pas, c’est qu’ils n’agissent pas entièrement par altruisme : eh oui, la plupart des bénévoles interrogés déclarent que donner leur procure un sentiment très fort d’utilité, voire d’importance. Se sentir utile renforce leur estime d’eux-mêmes, leur donne la sensation d’avoir une certaine valeur. Autant de choses qui rendent heureux, à n’en pas douter. De plus, se confronter à la misère des autres aide fortement à relativiser ses propres soucis et à se sentir, par contraste, privilégié. Et donc heureux.
5) Faire du sport (bouger)
C’est le regretté docteur David Servan-Schreiber qui le démontre dans son ouvrage « Guérir ». Il explique qu’en faisant faire 30 minutes de sport trois fois par semaine à des dépressifs chroniques pendant 4 mois, on parvient au même résultat que par la prise d’antidépresseurs. Et même mieux, car ces patients ne rechutent pas. Merci les hormones naturelles qui « shootent » notre cerveau lors d’une séance de sport, comme les endorphines. Et nul besoin d’être champion olympique : ça marche avec tout le monde, même ceux qui disent « ne pas aimer » le sport et ne pas être en bonne condition physique. Il suffit de pratiquer n’importe quelle activité physique (la marche vive par exemple) et de persévérer pendant suffisamment de temps pour que ces hormones magiques, libérées dans le cerveau régulièrement, chassent les idées noires. Par le sport, on peut ainsi non seulement guérir, mais aussi éviter la survenue d’un épisode dépressif.
6) Se fixer des objectifs réalistes
C’est primordial. Si vous pensez que vous devez absolument être millionnaire avant 25 ans, tel le Loup de Wall Street, c’est un calcul risqué. Comme vous avez statistiquement très peu de chances d’y parvenir, vous risquez le pétage de plombs : au mieux, sensation d’échec et d’amertume le jour de vos 25 ans, vous empêchant de vraiment vous amuser lors de votre soirée dance au Macumba (dire que normalement, j’aurais dû teufer sur mon yacht avec Jay-Z et Beyoncé), au pire, burn-out et overdose pour oublier. Se motiver, se fixer des buts, c’est bien ; mais s’imaginer maître du monde avant 30 ans, c’est un peu mégalo sur les bords, et généralement les personnes atteintes de mégalomanie finissent mal (en asile psychiatrique, en exil à sainte Hélène et empoisonné par les Anglais, etc). Il convient donc de se fixer des buts relativement réalistes : réussir le permis de conduire, perdre 3 kilos en deux mois et non pas en une semaine, décrocher un CDI (quoique, en cette période de crise, la définition du mot réaliste est peut-être à revoir).
7) Ne pas avoir trop d’attentes envers les autres
C’est logique : plus vos attentes (vis-à-vis des autres ou de la vie en général) sont élevées, plus vous courez le risque d’être déçu et donc malheureux. C’est une erreur fréquente en amour : on attend tout de l’autre, qu’il comble tous nos besoins, tout de suite. Or personne n’est capable de cela à la perfection. Il arrive souvent que l’on rencontre un partenaire qui comble nos besoins sexuels, mais pas nos besoins émotionnels, ou l’inverse. Il importe de trouver le bon compromis, le bon dosage, en gardant à l’esprit que personne sur cette terre n’est capable de combler tous nos besoins en permanence. Les femmes surtout ont tendance à appliquer cette recette catastrophe : on attend que le « bon » partenaire transforme miraculeusement notre vie, vienne nous arracher au sommeil comme le Prince de la Belle au bois dormant et nous transporte sur son tapis volant au pays des merveilles. Hélas, les contes de fées sont souvent des contes à dormir debout, et dans la vraie vie, nul Prince charmant ne viendra comme par magie réparer toutes vos failles. C’est à vous que reviendra ce privilège, et une relation saine avec un autre passe d’abord par une relation saine avec soi-même. Aime toi d’abord, et l’autre t’aimera, pourrait-on dire. Encore une étape vers le bonheur.
8) Compter uniquement sur soi-même
C’est la conséquence du point précédent: n’attendez jamais des autres qu’ils comblent vos besoins comme par magie, pensez plutôt à tenter d’y pourvoir vous-mêmes. Comme disait le regretté JFK : « ne vous demandez pas ce que le pays peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour votre pays ». Ou bien, selon la philosophie chrétienne : aide toi, et le ciel t’aidera. Car en matière de félicité, on est rarement mieux servi que par soi-même. En effet, qui mieux que vous peut connaître précisément vos besoins et vos envies ? Plutôt que d’attendre que les propositions viennent des autres, prenez des initiatives : si vous avez envie d’un dîner en amoureux au restaurant, n’attendez pas que Monsieur le suggère de lui-même, faites la réservation. Cela vaut également sur le plan professionnel : si vous attendez que le Grand Chef prenne soudainement la mesure de vos capacités exceptionnelles et vous offre la promotion du siècle sur un plateau, vous risquez d’attendre longtemps. Grand Chef ne verra rien du tout, trop préoccupé qu’il est par sa petite personne. A vous de vous manifester, de faire connaitre vos ambitions.
9) Accepter l’échec et renoncer à la perfection
Eh non, on ne peut pas toujours arriver à ses fins. Parfois on échoue même à atteindre les objectifs en apparence les plus simples : trouver une place de parking, par exemple. Pour autant, il faut savoir passer outre, ne pas s’appesantir sur un échec. Et surtout, se donner le droit d’échouer. Ceux qui veulent absolument être au top en permanence courent droit à la dépression nerveuse : car l’erreur est humaine et nous ne sommes que de pauvres créatures imparfaites. Sans tomber dans la loser attitude, il est bon de s’autoriser des moments de faiblesse, d’abandon. Être indulgent avec vous-mêmes vous aidera aussi à autoriser les autres à ne pas être parfaits, et les gens indulgents sont en général beaucoup plus appréciés que les tyrans exigeants ! Alors oui, Jean-Jacques a parfois un sale caractère, mais ça fait partie de son charme, et puis il cuisine bien et il bricole, alors on ne peut pas tout avoir. Les gens heureux n’attendent pas la perfection, ni d’eux-mêmes, ni des autres. Ils savent se contenter de ce qu’ils ont. « Si vous n’avez pas ce que vous aimez, aimez ce que vous avez ».
10) Se connaitre soi même
Socrate le disait déjà : connais-toi toi-même. C’est le but des psychothérapies : s’explorer pour se comprendre, savoir comment on fonctionne et pouvoir ainsi mieux se prendre en main. Par exemple, si on ne comprend pas pourquoi et comment fonctionne une phobie, on ne pourra pas vraiment s’en débarrasser, même en se « forçant ». Se connaître soi-même, ça a l’air simple, mais ça n’est pas si évident : ça demande une certaine capacité d’introspection, ce qui peut gêner les personnes qui n’aiment pas s’étendre sur leurs états d’âmes. Et pourtant, l’introspection est bien utile : entrer en contact avec son « moi » profond, se demander si l’on aime vraiment ce qu’on fait dans la vie par exemple, si l’on n’a pas des désirs inassouvis, c’est la première étape pour pouvoir les mettre en pratique et embellir sa vie. Si on fonce sans cesse tête baissée, sans se demander si la direction choisie nous emballe vraiment, on risque fort de passer à côté du bonheur. Qui suis-je ? De quoi ai-je vraiment envie ? Qu’est-ce qui me plait, quelles sont mes valeurs, mes talents, mes faiblesses ? En répondant à ces questions, vous saurez ce que vous aurez à faire pour vous rendre heureux.